Ce n’est pas le bon moment
Ce n’est jamais le bon moment
Les moments cousus à d’autres moments
Ne font jamais de bons moments
Les bons moments se comptent sur les doigts d’une vie
Écorchés aux tessons de bouteille
Aux nœuds barbelés
On passe on fait semblant
On se signe sous des déguisements
On s’embrasse on se lasse
On saigne à la moindre entaille
On boude on rit on bataille
On est ridicule à force de feindre
On est ridicule à force d’être sincère
Il y a des courants d’air jusque dans la chair de poule
Des courants d’air qui passent sous les portes sous les foules
Des respirations hautaines qui forcent le mastic
Qui rendent fous les domestiques
Je ne sais pas, une porte laissée grande ouverte
Comme si même au dehors
Des murs, des portes bornaient l’horizon
Un mur percé de mille meurtrières
Un mur en dents de ciel
Avec la guerre au-dessus des têtes
Comme un aigle, gorge déployée
Des bombes incendiaires
Des avions en parachute libre
La fin du monde
Mais parmi les ruines et les rancœurs
Le rire de l’enfant
Les lèvres aimées
La bonté plutôt que le bien
Les mots qui touchent
Les mains qui tiennent
Les bras qui serrent
Le moment tant attendu
Celui qu’on aura choisi
Parmi les chutes
Parmi les rushes
D’une comédie musicale
© Denis Petit-Benopoulos
